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Edith Delarue

Autrice

Edith Delarue Les choses qu'on casse

Les choses qu'on casse

Pièce en 10 tableaux- environ 1h

2 Hommes

Ahgnahr: 60 ans

Gabriel: 23 ans

Le projet de mise en scène de la Cie Les corps incandescents bénéficie du soutient de la Maison des Métallos

2018   Lauréat jeunes textes en liberté -

Mis en lecture par Léonce Henri Nlend, avec Marie-Julie Chalu et Tadié Tuéné 

  le 22 mars à Mains d’Œuvres

  Le 23 mars à EPS Ville Evrard en partenariat avec la MC93

2016   Lectures publiques à la Maison des Métallos 

 Mis en lecture par Edith Delarue

  le 24 octobre avec Abel Aboualiten et Hamza Ouechtati

  le 25 octobre avec Eric Bekheir et Selim Kerrou

2014 Rédaction de la pièce en résidence au Monastère de Saorge - Monument national de France.

Résumé

Ahgnahr, le père et Gabriel, son fils assistent à la destruction de leur immeuble. Un spectacle surprenant s’offre à eux. Au fur et à mesure que les murs tombent, des tableaux se révèlent au grand jour avant de disparaitre sous les coups des pelleteuses.

Un mois plus tôt, Gabriel est de retour. Il ne rentre pas chez son père. Il squatte les appartement laissés vides après le départ des voisins. Ahgnahr est le dernier habitant de la Tour. Chez lui, le temps semble figé. Son fils n’a pas donné de nouvelles pendant deux ans et le voilà qui revient graffer les murs de leur immeuble.

Il faudra beaucoup de bombes de peinture, beaucoup de détours beaucoup d’histoires pour briser le silence entre le père et le fils et renouer les liens qui permettront à l’un de grandir et à l’autre de partir.

Extrait

Tableau 6

J. - 19

 

BESOIN

DE BRILLER

DANS TES

YEUX ! *

 

 

 

Dans un autre appartement, au dernier étage, avec une fenêtre ouvrant largement sur la Seine d’un côté et des immeubles récemment construits de l’autre. Les peintures de Gabriel remplissent le reste de l’espace.

 

Ahgnahr – J’ai vu la ville se défaire et se refaire. Il n’y a que la Seine qui reste la même. Elle balade toujours ses péniches. Autrefois, elle me laissait croire qu’un ailleurs était possible. Aujourd’hui, ailleurs c’est ici. C’est un monstre puissant. Mais un monstre qui rassure, comme dans les histoires que je te racontais quand tu étais enfant. Pour te faire peur. Puissance et sécurité. Aujourd’hui, ils construisent des banques et des assurances. Des banques et des assurances comme nos ancêtres construisaient des lieux de prières et des forteresses. Ces buildings resteront vides la plupart du temps mais peu importe, ils imposent respect et crainte. Jusqu’à quel point ? Il n’y pas de forteresses imprenables ni de Dieux auxquels croire toujours. J’ai essayé de vous inculquer ces choses-là.

 

Gabriel – En arrosant les immeubles.

 

Ahgnahr – Tu te souviens ? Je te disais de prendre ton arrosoir avec toi, on a du travail. Et toi, tu répondais avec ta petite voix :

 

Gabriel – Mais je n’ai pas d’arrosoir.

 

Ahgnahr – Ce n’est pas grave, on va les arroser quand même.

 

Gabriel – Mais les immeubles ne poussent pas quand on les arrose. Ça ne sert à rien.

 

Ahgnahr – Comment ça, ça ne sert à rien ? Je te parie moi que si on les arrose tous les jours, ils finiront par pousser.

 

Gabriel – Ils finissaient toujours par sortir du sol. Et ce jour-là, tu prenais un air émerveillé. Tu ouvrais de grands yeux et coupais ta respiration. Regarde, je te l’avais bien dit ! Est-ce qu’on n’a pas fait du bon travail ?

 

Ahgnahr – On a fait du bon travail, papa ! Tu as grandi toi aussi, tu as arrêté de croire à mes histoires.

 

Gabriel – Je faisais semblant seulement, pour ressembler à un adolescent normal, mais j’ai continué de les arroser, tous les matins en allant au lycée.

 

Ahgnahr – Alors, tu as fait du bon travail. Ils ont bien poussé.

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